Par Forza o par Amore:  (livre d'or)
 
              I-  La Corse Votre hebdo : 31 octobre 2008
                                                            Véronique Emmanuelli

        Langue corse :  La mémoire, la fiction et l'amour.

    Petru Antoni aime faire de la littérature pour se souvenir d'événements fondateurs, redonner voix, émotion à la vérité des hommes, transmettre des mémoires collectives et intimes. Alors il rudoie, agrandit l'histoire, ajuste les fragments de celle-ci imagine des lignées, décrit des convictions, reproduit des combats et extirpes des personnages d'un passé lointain.     La posture narrative rend compte de son dernier roman en langue corse «Par Forza o par Amore ! da a Pax Romana à Ponte Novu » où les scènes du quotidien rural du XVIIIème siècle insulaire jouxtent les jours farouches et les espoirs haletants, passionnés des révolutionnaires corses.
    L'intrigue prend pour toile de fond Guagnu, en 1720. Le village natal de Circinellu - Dominique Leca - le curé guerrier, le compagnon fidèle, indomptable de Pascal Paoli met en scène Marcu Aureliu, «figlioli unicu d'Artiliu di Nesa è di zia Filicina, Pruprietarii di a castagniccia di U Divitaghju è di i compuli di U Pirellu.» Le jeune homme entame sa découverte du monde dans la salle de classe de l'école de Vico. L'établissement a ouvert ses portes grâce à l'opiniâtreté de Monsignore Costa, évêque de Sagone. La prélat a des véléités éducatives et un rang à tenir vis-à-vis de son homologue ajaccien. Une part du savoir transmis est ancré dans l'univers grec et latin tandis que d'autres apprentissages fixent des conflits, des intérêts géopolitiques et des élans spirituels. Les empereurs romains, les dieux grecs, les rois de France et les vandales bercent l'imagination de dix élèves. Ils retrouvent la trace de Sambucucciu d'Alandu, de Vincintellu d'Istria, un beau jour de 1434  "capimozzu in la corte di u palazzu ducale di Genova." Les fantômes des seigneurs cinarchesi n'en finissent pas de rôder. À travers les siècles, les voix  des Génois imposent leur tension tandis que Sampieru di Bastelica dégage une énergie stupéfiante, y compris au seuil du trépas. Les données correspondent à un parcours historique et conduisent à l'état contemporain des idées, des symboles, de la politique et de l'économie pour Marcu Aureliu. Le Guagnais, d'une nature curieuse à tendance encyclopédique a retenu par cœur tous les livres de la bibliothèque de l'institution scolaire. De cette façon, le jeune homme se croit un peu témoin du monde, un peu dépositaire de secrets essentiels. Sa démarche incarne ouverture aux autres. D'ailleurs, pour que son union avec Lucrezia -à la fois opaque et touchante- la fille de la signora Bradamante et di u sgiò Pauli Chigliani, soit belle, il faut qu'elle soit libérée de l'ignorance.
    Le récit du passé, avec ses mouvements, sa puissance créent de l'intimité romantique. Le fiancé retrace, dénonce, explique des identités, révèle des audaces, s'autorise des incadescences. Dans la douceur bienheureuse et bienfaisante du maquis, l'érudition subtile, généreuse enchante Lucrezia et installe une atmosphère studieuse. L'adolescente, les yeux pleins de sourires, écoute, bascule dans de doux émerveillements. Elle se veut, se croit en paix: «Lucrezia stava sempre à sente u discorsu di Marcu Aureliu, cù ammirazione.»
    L'amour des deux adolescents se nourrit aussi d'attente, d'espérance et de rendez-vous hebdomadaires. C'est la règle établie: «Marcu Aureliu è Lucrezia si dicenu u so amore ind'unu avvicinu timicosu, sottu l'elpa guagnesa di u Ghjargalu.» Les journées s'empilent. Jusqu'à ce que se noue le drame. La perversité de «a legge di u Sacru Cunciliu di Trenta» interfère dans le bonheur élégiaque. Le rêve se fige dans une fatalité impitoyable et dans la hantise du péché: «Marcu Aureliu sà avà ch'ellu ùn chersera mai una dispensa per immaritassi.  Comu falla sapè à Lucrezia?» Le désarroi de celle-ci sera terrifiant. Il ouvre une rupture sur des perpesctives atroces. Marcu Aueliu pendant ce temps, oscille entre des émotions extrêmes. Il se consume dans la culpabilité, se barricade dans une solitude farouche. Avant de s'élancer dans l'avenir. La faculté d'être en retrait de la communauté villageoise a sans doute été le prélude à une renaissance. Aucune épreuve ne semble assez rude pour faire obstacle au destin du garçon. Une autre vie est à portée. La religion est un indice d'espérance, un anti dote: «Crergu in Diu, in lu Spiritu Santu è ind'i u so Figliolu fattu omu (...) quessa hè la me fede.» Le voyage semble vivifier, accélérer les idées. La volonté d'exil se concrétise sur les quais de Calvi. Elle mènera à Gênes. Là,  les retrouvailles avec de jeunes Corses sont chaleureuses et rassurantes. Auparavent, «ellu spuni annantu a u fronte (di Lucrezia) un basgiu longu, incrusciatu di lacrime.»
    Au cours des années qui suivront, les républiques italiennes avec leurs palais et leurs œuvres d'art subjuguent et dérangent le Guagnais. Marcu Aureliu ne succombe pas à la résignation. Il médite des injustices, les frustations. Il cherche  à comprendre, entre autres «u cuntrastu trà i palazzi genuvesi è e casarelle di Guagnu.» La première révolte des Corses contre Gênes consacre sa réflexion. L'île a besoin de nouvelles valeurs. Il y a quelque chose d'utopique dans le soulèvement. Il débouche pourtant, sans tarder, sur un second puis sur un troisième épisode. Comme autant de déflagrations dans le réel local. L'insoumission est plus structurée, plus féroce. La Corse génoise tout entière paraît s'affaisser. Les querelles, les impressions de liberté enflamment les consultes d'Orezza, d'Ampugnani, et plus tard du Nebbiu. Le duc de Choiseul, le général Gaffory, Pasqual Paoli, Matteu Buttafocu tronituants, surgissent dans le récit. Marcu Aureliu désormais prêtre, vit le traité de Compiègne, compose avec l'université de Corté. Son regard s'arrête sur Circinellu. Les combats de celui-ci  sont un peu les siens.
    Petru Antoni fait revivre une multitude de personnages et tisse une trame sertie de multiples références intellectuelles.
        Un livre alerte et pédagogique.
                                                                   
Véronique Emmanuelli      "La Corse Votre Hebdo"


    II-  Foru  corsu  Libri ghjuvativi  ( Quelques livres utiles)

        Hè sciutu "Par Forza o Par Amore", da Petru Antoni è l'edizione ALBIANA/CCU. Si tratta quì di cuntà a storia di a Corsica da a Pax Rumana finament'à Ponte Novu, cum'ellu a palesa u titulu.
      Un libru d'intaressu, classificatu "literatura da giovani", è infatti li sarà di ghjovu, ma dinò à i più vechji li farà prò.(...)

    Traduction : Le livre "Par Forza o par Amore" de Petru Antoni, édition Albiana/CCU, vient de sortir. Comme son titre l'indique, c'est l'histoire de la Corse, de la Pax Rumana à Ponte Novu qui  y est traitée.
    Un livre d'intérêt classifié "Littérature pour jeunes", en effet cela leur sera utile, mais il sera aussi bénéfique aux plus anciens. (...)
 
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