Cuttoli Cortichjatu, les forgerons, les menuisiers, les couteliers.

 

Dans le lit du fleuve, Alba et ses compagnes faisaient la lessive. Il y avait Francesca, qui à 37 ans espérait encore fonder une famille, Ghjasippina de la Chjappa, Antuniola du Pitrosu et Marietta de l’Arinella. Comme par le passé, il me semblait que Marietta tentait d’exprimer son penchant pour moi, mais mon regard évitait le sien. Mes yeux et mon cœur, étaient pleins de Vannina.

Armée d’un manche à balai, Alba remuait du linge blanc dans un chaudron d’eau bouillante additionnée de cendres. Les femmes savonnaient et rinçaient les draps dans le courant, avant de les étendre au soleil, sur les cistes et les lavandes sauvages au parfum épicé. Leurs voix claires et pointues, entrecoupées d’éclats de rire, se mêlaient au bruissement chuintant de l’eau. Puisqu’elles parlaient toutes en même temps, aucune ne pouvait comprendre ce que disait l’autre. L’important semblait être plus le fait de parler que celui d’écouter.

– O Bastià’, viens nous aider !

– Pourquoi t’en vas-tu ? Reste avec nous, à Carba !

– Comment ferons-nous sans toi ?

– Vois Marietta ! Elle n’a d’yeux que pour toi !

En se faisant entendre, chacune voulait se faire remarquer. Timide, le visage empourpré, Marietta restait coite. Ces considérations me faisaient chaud au cœur, mais me laissaient de marbre. Ma pensée cheminait déjà par ces contrées inconnues, où vivait Vannina, Vannina et notre serment.

C’est ici, au fond du champ de Téti, que la vendetta avait échoué. Le dilemme en mon cœur restait vivant, entre les deux promesses, “ensemble pour toujours ou seuls à jamais” et “vendetta ou honte à moi”. La première, ouverte sur la lumière de la vie ; la seconde, fermée sous une pluie de larmes et l’obscurité de la mort, toutes deux, de la plus grande importance. La mort la plus injuste, celle de père Bartulumeu ne doit pas rester sans vengeance. L’amour ne peut être étouffé, en dépit des séparations qu’entretient l’horloge de l’univers, le temps. Passer les cols, poursuivre par vallées et collines, l’amour en fuite, voici dans l’immédiat ma sainte priorité.

Après avoir franchi le fleuve, je gravis le sentier jusqu’à la crête que surplombe le Mont Sant’ Eliseu, et dévalai sur le village de Tavacu. A la nuit tombante, je frappai à la porte de ziu Lampinu, qui me reçut chaleureusement. Je tentai de remercier l’ami de mon père, en tirant du sac en peau de chèvre du pain d’orge, des saucissons, des figatelli, du fromage, des figues sèches et des noix. Il accepta de goûter seulement au fromage de Marcellu, de bonne réputation. Je remballai mes victuailles, sachant au fond de moi, que ma route risquait d’être longue.

De Tavacu, je suis descendu vers Carazzi pour grimper ensuite à Cuttuli-Cortichjatu. Je me dis : “de ce village, je me rendrai de temps en temps à la ville d’Ajaccio. Pour le travail, il y a de quoi faire ici. Je pourrai apprendre le métier de menuisier ou de forgeron”.

Mille coups de marteaux résonnaient sur cent enclumes, comme tintements de cloches. Ces musiques répandaient dans l’air une joyeuse vitalité. Le souffle des forges ajoutait une respiration aux chants des enclumes. Le village vivait, soupirait, chantait à la mesure des outils, maniés avec adresse par les artisans. Les bruits mêlés des varlopes, des râpes, des limes, des masses, des enclumes, des soufflets, des flammes..., donnaient une âme, une vie au village.

En plus des travaux habituels du berger, du fromager, du boulanger, du boucher, du charcutier, du cultivateur, et d’autres occupations, quand il le fallait, les paysans étaient tour à tour, meuniers, ouvriers broyeurs d’olives, menuisiers et forgerons. Chaque saison ramenait infailliblement ses propres travaux. Les moulins broyaient l’orge et le blé, de Juillet à Septembre, et les châtaignes, de Novembre à Décembre. Un meunier, un berger ou un cultivateur devenait ouvrier de pressage d’olives de Janvier à Avril. Les métiers de menuisier et de forgeron, nécessitaient une pratique et des outils particuliers.

Le menuisier fabriquait des meubles simples et utiles, (maies, tables, plateaux, bancs...) à la demande. Toujours commandés inopinément, les cercueil[1] s’exécutaient dans l’urgence. Alors, l’artisan devait se faire aider, afin que la bière soit prête à l’heure des obsèques, le plus souvent le lendemain du décès.

Comme le menuisier, le forgeron possédait une expérience propre à son métier. Donner forme à un morceau de métal, pour réaliser des fers à cheval bien ajustés aux sabots des chevaux, exigeait une longue pratique.

A Cuttuli-Cortichjatu, onze forgerons s’employaient à la fabrication et à la réparation de socs de charrue, de pioches, de houes, de ferrures de portes, de parties métalliques fixes ou mobiles des moulins, et de tous les outils nécessaires à la vie de la piève. L’art du forgeron résidait aussi, dans la manière de donner la trempe à un gouet, une hache, une serpe... Cet artisan savait être étameur de casseroles, de marmites et de chaudrons. De plus, il traitait les douleurs de la sciatique, par les pointes de feu d’une broche chauffée au rouge. A l’aide de pinces maniées adroitement, il arrachait même une dent douloureuse, selon le proverbe : “plus de dent, plus de douleur”. Le forgeron soignait aussi les animaux.

Combien de métaux ai-je martelés, pour apprendre le métier de forgeron ! Ce tintement clair et rythmé de l’enclume, je l’entends encore aujourd’hui dans ma tête.

 

D’après moi, le coutelier lui, serait un forgeron d’art. Forger des lames fines, nécessite des connaissances spéciales adaptées aux nombreuses sortes de couteaux. Fabriqué en Castagniccia, le stylet, arme de défense effilée et pointue, peut être caché dans la ceinture. Quant au couteau de poche[2], il n’est pas un paysan qui n’en porte un sur lui ; sa lame se referme dans un manche en bois ou en corne, parfois bien ouvragé. Son usage est quotidien, aussi bien au cours du repas, que pour couper un rameau en chemin, ou comme poignard.

 

L’instituteur taillait les plumes d’oie avec la temperina, petit couteau qu’il tirait de la poche de son veston. Avec une spuntichja, poinçon à lame fine triangulaire, Marcellu saignait les cochons et autres animaux. Durant ma vie de journalier, j’ai utilisé plusieurs modèles de couteaux fabriqués en Corse[3]. A San Benedettu, j’ai utilisé la pittuta pour sculpter des moules à pipes. Cet outil à lame galbée, est bien adapté à la fabrication d’objets usuels en bois : louches, cuillers, poches de seille, écuelles... J’ai greffé des arbres fruitiers et vendangé avec la runchetta. L’oiseleur n’oubliait jamais cette espèce de serpette, lorsqu’il s’en allait tendre des collets dans le maquis. Le couteau d’Ascu, au manche de bois sculpté en forme de tête d’animal, inspirait sans doute certains penseurs poètes, lorsque assis sur une murette, une badine à la main, ils méditaient en l’entaillant machinalement. 

 

Par ailleurs, ces couteaux me rappelaient ma promesse : “Vengeance ou honte à moi”. Mais Vannina apparaissait aussitôt à ma mémoire, me parlait, me disait son amour. Alors, je tapais sur l’enclume avec une vigueur telle, que le coutelier surpris, me disait :

– O Bastianu, qu’est-ce qui te prend ? Tu vas me casser les outils !

Ma rancœur était toujours suivie d’un moment de découragement, d’accablement. Puis, l’espérance de réaliser notre promesse : “Ensemble pour toujours”, emplissait mon cœur à nouveau. Qu’elle soit entrée dans les ordres, cela je ne pouvais le croire !

Au couchant, par-dessus les rochers de Piscia Rossa, le soleil jetait un ultime rayon d’or sur les maisons de Cuttuli-Cortichjatu. En poussant le reflet de soleil vers les hauteurs du Monte Niellu, l’ombre faisait taire, peu à peu, le chant des enclumes. Le village entrait dans la somnolence de la soirée. Le crépuscule bleuâtre voilait la vallée de la Gravona, tandis que le Monte d’Oru et la Punta Migliarellu dressaient au soleil couchant, leurs deux sommets galbés comme des seins de jeune fille.

 

Le premier Dimanche à Ajaccio, je me suis égaré au hasard des rues. Cette ville est bien plus importante que Vico. Tant de monde va et vient, comme les fourmis autour de la fourmilière, sans même vous voir. Devant une telle multitude de rues, comment savoir si Vannina se trouverait ici ? Timide, j’ai osé demander à quelque passant :

– Ne connaîtriez-vous pas Vannina ?

Certains me répondirent :

– Jeune homme, dans Ajaccio des Vannina il doit y en avoir plus d’une !

D’autres détournèrent la tête, dédaignant le campagnard que j’étais.

Cette première fois à Ajaccio, je ne sais plus si je cherche Vannina ou bien ma mère, cette femme à qui je voudrais donner un visage, un nom. C’est peut-être celle-ci, qui regarde d’un air narquois mon allure paysanne, ou celle-là, hautaine, qui passe sans me voir, ou bien cette autre, lavandière du Borgu aux mains violacées, écorchées vives, ou encore l’une de ces fidèles à l’église Saint Roch ? Parmi tant de mères, j’ai envie de leur crier :

– Maman ! Maman ! Ce nouveau-né déposé sur le seuil de San Bastianu, c’était moi ! Moi maman ! Vivant ! Moi Bastianu, je suis vivant !

Oui, je pense vraiment que ma mère m’avait déposé, et non pas abandonné. Depuis lors, quelle angoisse a dû être la sienne !

Le rêve fou de retrouver ma mère, ne doit pas me faire oublier le but de ma recherche, Vannina.

Chaque Dimanche, les quartiers du Borgu, du San Carlu et même de la Villette, m’étaient devenus familiers. Des jeunes filles brunes, j’en ai vu..., mais malheureusement pas, celle dont les yeux verts illuminaient un visage aux traits si purs, malgré les traces laissées par la variole.

Demain, je franchirai d’autres cols.





[1] – Certaines familles conservaient pour cette circonstance, des planches de châtaignier.

[2] – En langue corse, le couteau de table, cultellu, est au masculin, alors que le couteau de poche, cultella, est du féminin.

[3] – Note de l’auteur : Ces modèles de couteaux nous ont été confirmés par Ghjuvanni Biancucci, coutelier à Cuttuli-Cortichjatu.


 Retour U Paciaghju


 

Cuttuli Curtichjatu. I stazzunaghji, i bancalari, i cultillaghji.

 

Ind’u fiume, Alba è e so cumpagne facìanu a bugata. Ci era Francesca, fantina di trenta sett’anni, chì aspittava sempre di fà una famiglia, Ghjasippina di a Chjappa, Antuniola di  u Pitrosu è Marietta di l’Arinella. Cum’è sempre, mi parìa chì Marietta vulessi dimmi u saltu di u so core, mà u me sguardu cansava u soiu. I me ochji è lu core èranu pieni di Vannina.

Inc’un mànicu di spazzola, Alba bulicava i panni bianchi ind’un paghjulone d’acqua cinnarosa bullente. E donne insapunàvanu è sciacquigliàvanu i linzoli ind’u currente, nanzu di tèndeli à u sole, sparti annantu à i muchji è u spigu salvàticu parfumati. E so voce chjare è pinzute intarrotte pà e risate, si mischjàvanu à u rimore misciulatu di l’acqua. Postu chì tutte parlavanu à listessu tempu, mancuna pudìa capisce ciò chì quillaltre dicìanu. L’impurtante, sarìa statu più quellu di parlà cà di sente.

– O Bastià’ veni à aiutacci !

– Parchè ti ne vai ? Stàtine cù noscu in Carba !

– Cumu faremu senza tè ?

– A vedi à Marietta ! Ùn hà ochji cà per tè !

Fèndusi sente, ogn’una vulìa fassi vede. Tìmica, a faccia impurpurata, Marietta si ne stava zita. Isse cunsiderazione mi tuccavanu lu core, mà mi lasciàvanu di màrmaru. U me pinseru caminava aghjà par isse loche incunisciute, induv’è campe Vannina, Vannina cù a nostra prumessa.

Ghjè quì, in fondu di u pianu à Teti, chì a vindetta avìa fattu “ciaba”. U dilemma stava vivu ind’u me core, trà e duie prumesse, “sempre inseme” è “vindetta”. A prima, aparta annant’à u lume di a vita ; a siconda sarrata sottu un piove di lacrime è u bughju di a morte, tutt’a duie, d’impurtanza a più maiò per mè. A morte à più inghjusta, quella di babbu Bartulumeu ùn pò stà invindicata. Ne menu, u focu di l’amore ùn pò esse ammatatu pà a siparazione aiutata da u riloghju di l’universu, u tempu. Saltà e bocche, andàmmine à circà pà valle è cullette l’amore in fughjitura, eccu in tantu a me santa primura.

Dopu d’avè francu u fiume culloiu sinu à a sarra, sottu à a punta di Sant’ Eliseu, è mi lampoiu in Tavacu. Ghjustu nanzu a notte, stancu, truvoiu alloghju ind’è ziu Lampinu, chì mi fece un’accuglienza calurosa. Aghju vulsutu ringraziallu cacciendu da a me narpia, pane d’orzu, salcicci, figatelli, casgiu, fighi secchi è noce. Mà, l’amicu di babbu ùn hà accittatu di tastà, cà u casgiu di Marcellu, di bona rinumata. Inzanoiu dinò e me pruviste, pinsendu chì a me strada risicava d’esse longa.

Da Tavacu, mi ne sò falatu versi Carazzi, nanzu di cullà  in Cuttuli-Curtichjatu. Mi dissu : “da issu paese andaraghju ogni tantu à a cità d’Aiacciu. Pà u travagliu, ci hè da fà, quì. Pudaràghju imparà, u mistieru di bancalaru o di stazzunaghju.”

Mille pichji di martellu ribumbàvanu annantu à centu alcùdine cum’è chjochj di campane. Isse mùsiche sparghjìanu ind’ì l’aria, una alegra vitalità. U sòffiu di i butacci, aghjustava un rispiru à i canti di l’alcùdine. U paese campava, suspirava, cantava à a misura di l’arnesi manighjati cun versu par l’artisgiani. I rimori imbulighjati di e spiane, e raspie, e lime, e mazze, l’alcùdine, i butacci, e fiare..., davanu un fiatu, un’ ànima, una vita à u paese.

In più di i travaglii cuntìnui di u pastore, di u casgiaghju, di u paniteru, di u macillaru, di u salamaghju, di u cultivatore è d’altre faccende, quand’ellu ci vulìa, i paisani èranu tornu à tornu, mulinaghji, franghjatori, bancalari è stazzunaghji. Ogni staghjone, arricava e so pròprie faccende. I mulini macinàvanu orzu è granu, da lugliu à sittembre, è castagne da nuvembre à dicembre. Un mulinaghju, un pastore o un campagnolu, si facìa franghjatore da ghjinaghju à aprile. U mistieru di bancalaru o di stazzunaghju abbisugnava attrazzi è pràtica particulari.

U bancalaru facìa i mòbuli ghjuvèvuli è urdinarii, (madie, letti, tole, tavulini, panche,...) à la cummanda. E cascie[1], cumandate à l’impruvisu, eranu sempre fatte à la lestra. Tandu, l’artisgianu si facìa aiutà, affinche a barra sìa pronta pè a scirata, suvente u lindumane di a morte.

Cum’è u bancalaru, u stazzunaghju avìa una spirienza pròpria à u mistieru. Dà forma à un pezzu di farru, per fà chjappe aghjustate à e zampe di cavalli, ci vulìa arte è ingeniu.

In Cuttuli-Curtichjatu, ondici stazzunaghji facìanu è riparàvanu punte di cunceghju, zapponi, zappe, ferrature d’usciu, cumpunenti stàbile o mòbile di mulini, è tutti l’attiglii abbisugnèvule pè a vita di a pieva. L’arte di u stazzunaghju stava dinò, ind’a sò manera di dà a tèmpara à un pinnatu, à una piola, à una rustaghja... Ist’artisgianu sapìa fà da paghjulaghju, per ristagnà cazzarole, pignatte è paghjuloni. Di più, ellu tagliava e frizzure di a scètica, cù e punte di focu d’un spetu caldu. E pinze manighjate cun manera, facìanu ancu saltà un dente frizzurosu, sicondu u pruverbiu : “fora u dente, fora a pena.” Un stazzunaghju dava dinò accuratezza à l’animali.

Quantu ferrìngule aghju martillatu per imparà è fà da stazzunaghju. Issu chjocu rimatu chjaru di l’alcùdine, u sentu sempre oghje ind’u me capu.

 

In quant’à mè, ellu, u cultillaghju sarìa un stazzunaghju d’arte. Fà e lame fine, abbisogne cunniscenze speciale addatate à parechje spezie di cultelli, è ci ne hè assai. Fattu in Castagniccia, u stilu, arma di difesa pinzuta, pò  stà piattu ind’a cinta. Ogni paisanu tene sempre una cultella[2], ind’a so stacca ; a so lama si sarre ind’un mànicu di legnu o di corra, certe volte ben riccamatu. L’usu di a cultella hè d’ogni ghjornu, sìa pè u pastu, per muzzà una talla di lamaghja strada facendu o a difesa. 

U stututore appinzava e piume d’oca cù a temperina, pìccula cultella ch’ellu caciava da u so stacchinu. C’una spuntichja, lama pinzuta fina è triangulara, Marcellu pulzava i porci ed altri animali. Durante a me vita sana di ghjurnaleru, mi socu ghjuvatu di parecchji mudelli di cultelle, fatte in Corsica[3]. A San Benedettu, aghju zuccatu parechje forme di pipa cù a cultella pittuta. A lama aggarbata d’iss’attrazzu, ghjè adattata per fà l’oggetti usuali di legnu : cochje, cuchjare, nappi di tinella, ciuttulelle,... Aghju ancu insitatu arburini cù a runchetta. L’accilaghju ùn isminticava mai issa spezia di falcinu, quand’ellu andava à tende i so capiì ind’a machja. A cultella d’Ascu, cù u mànicu di legnu zuccatu in forma di capu d’animalu, inspirava podassi u pueta, quandu, pusendu annantu à una muraglietta, ellu pinzava appinzendu u rochju.

Per altru, issi cultelli mi ramintàvanu a prumessa : “vindetta o vargogna”. Mà, Vannina mi vinìa sùbitu in capu, mi parlava, mi dicìa u sò amore. Tandu, pichjava annantu à u tassu cù talmente fùria, ciò chì facìa dì à u cultillaghju :

– O Bastià’, chì ti piglie ? Ai da sprifundammi tutti l’arnesi !

Issa stizza era sempre seguitata d’una stonda di scuraghjmentu, d’acciacamentu. Eppoi, a speranza di compie a nostra prumessa, “per sempre inseme”, impiìa dinò lu me core. Ch’ella si sìa fatta sora, què ùn da pudìa crede !

A u punente, par sopra à l’elpe di Piscia Rossa, u sole lampava un’ ultima spira d’oru annantu à e case di Cuttuli-Curtichjatu. Puntendu u chjar’ di sole à l’insù, versi a punta di U Monte Niellu, l’ombra facìa tace pocu à pocu i canti di l’alcùdine. U paese cuminciava u pènciulu di a sera. U crepùsculu turchinìcciu fasciava avà a valle di a Gravona, mentre chì, u Monte d’Oru è a Punta Migliarellu arrizzavanu à u sole punente, i sò dui pinzi aggarbati cum’è pùppule di ghjuvanotta.

 

A prima Dumenica in Aiacciu, mi sò spapersu pà i carrughji. Issa cità hè bella più maiò cà Vicu. Tanta ghjente và è vene cum’è e furmìcule di a Furmicaghja, senza vedevi. In tante strette, cumu fà per sapè si Vannina sarà quì ? Tìmicu, aghju ancu chersu à qualchi unu :

– Ùn cunnisciarìate micca à Vannina ?

Certi mi risposenu :

– Ghjuvanottu, Vannina in Aiacciu ci ne sarà più d’una !

Senza dammi capu, d’altri, m’avaranu pigliatu per un paisanu tontu.

Issa prima volta in Aiacciu, ùn socu mancu più s’e’ cercu à Vannina o ancu a me mamma, issa donna à quale vularìa dà una faccia, un nome. Sarà podassi questa quì, chì fighjule scherzosa a me andatura paisana, o quist’ altra, altiriosa, chì franche senza vèdemi, o quill’ altra, lavaghjola di u Borgu, e so mani viulace scarabuchjate à carne viva, o una di quelle culà, fidate in ghjesgia di San Roccu ?  Frà tante mamme, mi vene a voglia di stridalli :

– O mà’ ! O mà’ ! Quella criatura sposta annantu à u mutale di San Bastianu, eru eiu ! Eiu o mà’ ! Vivu ! Eiu Bastianu, socu vivu ! Vivu minà !

Iè ! Veramente, mamma m’avìa spostu, mà micca abbandunatu. A so angoscia, dipoi tandu !

U sonniu scemu di truvà à mamma, ùn deve fammi sminticà u scopu di a me cerca, Vannina.

 Ogni Dumenica, i quartieri di u Borgu, di u San Carlu è ancu di a Villetta, m’èranu divintati famigliari. Ghjuvanotte brune ne aghju vistu assai..., mà per disgrazia, micca quella di a quale, l’ochji verdulini accindìanu un visu à i tratti cusì puri, bench’ellu fussi pichjulatu da u varghjolu. 

Dumane, saltaraghju d’altre sarre.




[1] – Certe famiglie tinìanu e tavule castagnine, spressu per issa circustanza.

 

[2] – In lingua nustrale, pè a tola cultellu ghjè maschile, umbece chì pè a stacca, cultella hè fimminile.

[3] – Nota di l’autore : Isti mudelli di cultelle ci sò stati cunfirmati par Ghjuvanni Biancucci, cultillaghju d’arte in Cuttuli-Curtichjatu.